1000 Feuilles"Vous ne pouvez pas échouer. Ou vous gagnez, ou vous prenez une leçon. L’échec n'arrive que le jour où vous abandonnez." Tout projet va avec une quantité astronomique de problèmes qui apparaissent l'un après l'autre, au fil du temps. Il y a 2 façon d’appréhender cette situation. 2 états d’esprits : Le Mindset Anglo-Saxon, et le Mindset hérité des lumières. Le premier se nourrit du quotidien, et de la nécessité d’y faire face, d’avancer coûte que coûte, la bourse vide, la gourde à moitié pleine, les mains calleuses et le regard à perte de vue, posé sur les vastes plaines des premiers pionniers de l’Ouest Américain. Le second prend racine dans le confort alimentaire des monastères, les cours des grands de ce monde, les conversations épistolaires et le siècle des lumières. Le premier ne compte sur personne, sinon une maigre communauté et de faibles moyens. Le second ne s’embarrasse pas de la question du quotidien, car l’état ou son substitut pourvoit souvent au gite et au couvert, pour libérer un temps qui pourra tout entier être consacré à la recherche, au projet, aux publications des quelques élus autorisés à entrer dans le cercle restreint des « chercheurs » et autres « acteurs » subventionnés. Ainsi de l’autre côté de l’atlantique, 5% des moyens d’un projet suffisent à son lancement, là où en Europe et en France en particulier, on exigera de vous que vous disposiez déjà, à grand renfort de dossiers, projections, partenaires et autres fonds d’état, d’un business plan établi, d’une stratégie affinée et d’une garantie quasi-totale de succès. Le premier Mindset promet l’aventure, la ruée vers l’or, les chariots, bandits de grands chemins et méchants indiens. Le second exige la fin avant le chemin. Là où le premier accepte la vie, ses aléas, et dispose d’une foi inébranlable en la capacité de chacun à transcender chaque obstacle à venir, le second exige le résultat. Pourtant, dans un monde incertain, rien n’est moins probable que le succès. Dans ce monde incertain le second Mindset ne génère bien souvent qu'immobilisme, stagnation et timidité. Oui mais ! direz-vous, et à juste titre, le premier modèle expose au risque, à la perte, donc à la mort réelle ou symbolique, quand le second tente de protéger, voir de décourager les entreprises hasardeuses (Mais qui est légitime pour décider si mon entreprise est ou n’est pas hasardeuse ? Qui est légitime pour m’autoriser ou non à entreprendre un voyage, aussi dangereux soit-il ?). Personne ! C’est à ce formatage culturel que le vieux monde se reconnait. Le vieux monde ne sait plus oser. Pire ! Il décourage de nombreux porteurs d'idées par la mise en place de rouages d’une complexité sans fin. iDrop est né du Mindset n°1. On réglerait les problèmes au fur et à mesure de leur apparition. iDrop#1 avait déjà, dans toute son imperfection permis de contourner et d’identifier quelques obstacles : Développer sans savoir coder. Prendre concrètement conscience que le trop invalide le suffisant. Découvrir qu’il serait certainement plus facile de travailler directement avec les apprenants qu’avec leurs formateurs (avec tout le respect que je porte à la majorité d’entre eux, pour rester équanime). Le premier problème que iDrop#2 eut à surmonter était purement technique. Mais il bloqua le projet pendant quelques mois. Quand je vois que la solution trouvée était enfantine… et qu’elle fait toujours partie aujourd’hui de la structure intime de la plateforme, je ne suis pas très fier d'avoir mis autant de temps à le comprendre. Le problème était lié à la quantité de pages à gérer, et aux outils de recherche dont l’utilisation devenait indispensable. A la source de ce problème on trouvait la nature même des ressources pédagogiques à notre disposition. Ce terme dans son acception utilisée en formation est une catastrophe. Il veut tout et rien dire. Jamais il n’aurait dû être inventé. « Truc » est bien plus efficace. On sait au moins que « truc » renvoie à quelque chose d’imprécis, sans pour autant que le terme lui-même ne laisse entendre ce qu’il n’est pas. Une ressource pédagogique est un truc dont on se sert pour animer une formation, ou un truc qui nous permet de comprendre quelque chose de ce que l’on étudie. Un cours est une ressource. iDrop#1 a commencé par diffuser des cours en ligne. Des cours complets. 25 pages d’un sujet. Ou un ouvrage de référence de 273 pages. En cela, il jouait le rôle d’une bibliothèque en ligne. Rien d’extraordinaire. Mais nous ne voulions pas d’une bibliothèque. Nous voulions des « réponses ». D’ailleurs le Pitch du RDV de 2011 à la Région Normandie était : « iDrop : Un question - Une réponse en trois minutes. » et non pas : « iDrop : Une question - Un cours de 25 pages et débrouille toi avec ça ! » Ce qui mettait 2 sujets nouveaux sur la table. Le « découpage des cours » et l’architecture en ligne du « Back office ». Le découpage disait ceci. Puisque nous ne voulions pas de cours en bloc pour tout un tas de raison. Les 3 principales étant : 1) Personne ne lit un manuel de 25 pages sur internet. 2) Personne ne veut perdre son temps à éplucher un cours pour trouver la réponse à la question qu’il se pose. 3) Internet est dominé par la règle des 3 clics (probablement réduite à 2 en 2019. Mais 3 c’est déjà pas mal). Règle qui énonce que si l’usager n’a pas trouvé sa réponse en 3 clics, il quitte le site. En aparté, dans un monde en ligne où la quantité d’informations croit de façon exponentielle, la question du temps passé en recherches est de premier ordre. Depuis l’origine d’internet, 90% des données stockées sur le Web ont été créés ces deux dernières années (2017-2018). Le temps de réaction du système, c’est-à-dire le temps qui s’écoule entre le moment où je me pose la question (sous réserve que je sois capable de me la poser correctement), et le moment où je trouve une réponse qui me convienne sur iDrop devenait capital. Il était inenvisageable de devoir errer 20 minutes pour trouver la valeur du coefficient de foisonnement de la terre végétale, ou la formule de calcul du volume d’une sphère, simplement parce que chacune de ces informations est perdue quelque part dans les cours intitulés « Généralités des matériaux de terrassements » et « Mathématiques appliquées aux métrés et cubatures. » Cours qui, au passage, sont correctement référencés dans une nomenclature inconnue de l’apprenant lambda. Pour résumer, nous en étions à : « Nos ressources en lignes sont exploitables par des formateurs qui ne souhaites pas des exploiter; mais inexploitables par des apprenants qui souhaitent les utiliser, mais pas s'y perdre.» « Qui sont nos clients ? » aurait dit Steve Jobs. Nos clients (apprenants) sont ceux qui veulent apprendre, pas ceux qui savent déjà. iDrop devait donc trouver le moyen de devenir facilement accessible à ceux qui ne savent pas, mais sont désireux d’apprendre. Et les autres ? … Les autres on verra plus tard... Peut être. Exit la structure classique des cours. Exit les titres abscons, les formulations académiques, les tournures alambiquées et les « foutages de gueule ». A ce titre, j’en ai un qui vaut son pesant de cacahuètes et qui illustre à lui tout seul toute l’absurdité d’un système nombriliste, narcissique qui a perdu et son âme et le sens même de son existence. L’exemple est le suivant. De mon temps on le trouvait dans les livres de physique de 4ème. Il s’agit d’une définition soit disant simple, destinée à expliquer la notion de tension électrique entre 2 points d’un circuit. La tension est un phénomène électrique difficile à se représenter quand on a 14 ans et qu'on dispose, comme seule connaissance empirique de électricité, du geste qui consiste à actionner un bouton, via lequel, presque par magie, on fait s’allumer une ampoule ou une X.Box. Notre livre de 4ème donne la définition suivante : « La tension entre deux points d’un circuit, est la différence de potentiel électrique entre ces 2 points ». Fin de l’explication. Moi, à 14 ans, si on me dit ça. J’ouvre de grands yeux et je ferme ma bouche pour voir si autour de moi quelqu’un comprend quelque chose à cette phrase. L’arnaque éducative, car c’en est une, consiste à définir un terme complexe en utilisant un terme plus complexe encore, qui lui n’est bien sûr pas expliqué. Regardez les cours de vos enfants, ou reprenez vos propres cours, ils sont truffés de chausses trappes de ce genre. Les cours tout d’un bloc que nous avions mis en ligne, après lecture approfondie, n’échappaient pas à la règle. Horreur ! Le problème s’avérait bien plus profond qu’il n’y paraissait. Dans le fond de ma tête, mon apprenant test s’en donnait à cœur joie. Il se livrait, non plus à un démontage organisé des cours de nos formateurs, mais plutôt à un massacre rangé de toute les ressources traditionnelles que nous passions au crible : Absence de sens. Termes non définis. Redondances. Liens logiques absents. Et j’en passe. Le fond technique était là. Solide, certes ! Mais la forme n’avait rien de pédagogique, en ce qu’elle devait permettre à mon lecteur test de rapidement comprendre ce dont il s’agissait pour disposer d’une réponse satisfaisante. Il devenait alors indispensable de définir le « grain », c’est-à-dire la taille minimale du plus petit bloc à mettre en ligne, sa finalité, sa structure et la façon dont il devait être connecté aux autres grains pour que l'ensemble constitue un corpus cohérent. Cette question là n’avait rien de technique, mais elle soulevait un problème de fond, qui lui, était purement technique. Supposons le « format » du grain défini, ce qui n’était pas encore le cas, mais supposons ! Là où stocker les cours d’une année quelconque de CAP, nécessitait la mise en ligne de quelques dizaines de pages Web trop lourdes pour être exploitables, mettre en ligne des « Grains » exploitables à l’unité, faisait passer le nombre de pages à gérer de quelques dizaines, à plusieurs centaines, voire plusieurs milliers. Vision de cauchemar. Nous nous trouvions subitement devant la porte d'entrée de la "Bibliothèque de Babel" comme JL Borges la décrit dans la nouvelle éponyme de son recueil « Fictions». Une Bibliothèque alvéolaire de structure vertigineuse. C'est finalement cette vision qui donna la solution. La Bibliothèque de Babel ne gère pas des livres. Elle gère des alvéoles de livres. Nous devions donc introduire une dimension supplémentaire à l'architecture de notre site. Tel que Weebly permettait de travailler, gérer 20 ou 30 pages de site était faisable. Mais gérer plusieurs milliers de pages devenait un véritable casse-tête pour le Bibliothécaire digital en herbe que j’étais. Il fallait trouver un système de gestion plus subtil. Ce qui demanda environ un trimestre pendant lequel toute mise en ligne de contenus fut stoppée. Non pas un trimestre pour construire ou coder l’architecture adaptée. J’en étais bien incapable. Mais pour agir dans une démarche frugale, en détournant des outils déjà existants et trouver la fonctionnalité qui nous permettrait d'introduire la dimension qui rendrait le travail de classement des "grains" accessible à une vie d'homme.
La solution était sous mes yeux depuis le premier jour où j’ai utilisé Weebly. Elle résidait dans la fonction « Page de Blog ». Fonction que j’avais jusque là mise de côté, puisque je créais un site et non un blog. Encore un biais cognitif qui m’avais prématurément fais évacuer la solution à venir d’un problème qui ne s’était pas encore posé. Je n’ai pas conservé le souvenir du moment où la solution m’est apparue. Je garde juste trace de l’émotion qu'elle suscita. Je me suis dit: « Quel con ! Mais bien sur !!! » Et juste après : « Merde ! Il faut tout recommencer ! ». Tout ce qui avait été mis en ligne en tant que "page Web", allait devoir migrer en "post de blog". Mais le mal était bénin, puisque de toute façon l’ensemble des cours monoblocs devaient être remaniés, segmentés en grains pour suivre le principe suivant : " Une notion, un post". Grains qu'il conviendrait ensuite de scénariser puis d'illustrer pour le rendre facilement assimilable. Jusque là, nous avions développé iDrop#1 comme un site qui articulait et gérait des pages. Chaque page ayant potentiellement une dimension infinie. Mais comme chaque page (associée à un cours) devenait trop volumineuse pour permettre une navigation ergonomique et efficace, il fallait passer à un autre niveau, et ne plus gérer des pages, mais des pages de blogs. Et ainsi procéder comme Borges dans sa monstrueuse bibliothèque. C’est-à-dire ordonner des pages de pages, capables d’abriter un nombre illimité de grains, disposant en chacune d’un système interne de classement par catégories, et de connexions. Ce qui ne rendrait pas travail moins fastidieux, mais faciliterait grandement le suivi et la maintenance des contenus. Cette nouvelle architecture allait constituer le fondement même de iDrop#2 et des versions ultérieures. Nous venions de trouver un nouvel élan grâce l'une des deux œuvres littéraires au programme de Math Sup 1986-87, restée rangée dans un coin de ma tête pendant presque 1/4 de siècle. 'Connecting the points ! "
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